L’une des procéures de l’alterité est le récit des merveilles de l’Orient qui est le topos important du discours éthnographique.
Le discours narratif change dans la chronique de Guillaume de Tyr. Les chroniqueurs de la Première croisade s’appuient sur les chansons de geste. Le monde musulman est interprété dans l’esprit de la culture médiévale. On observe revolution du symbolisme vers réalisme dans la chronique de Guiilaume de Tyr. Il perçoit le monde musulman non seulement en s’appuyant sur la tradition précédente et la mémoire, mais aussi sur leur propre expérience. La manière de narration change — le portrait collectif est représenté dans les chroniques de la Première croisade, tandis que les portraits des musulmans chez Guillaume de Tyr sont beaucoup plus individualisés.
Au cours de l’analyse des textes on discerne une autre différence de la manière narrative (de la rhétorique de l’alterité): d’une part, les chroniqueurs de la Première croisade parlent toujours de la première personne, en utilisant les forme grammatiques comme «nous» (nos, nostri). C’est de cette manière que le narrateur donne plus de poids à sa parole et atteste l’authenticité des évènements à son destinataire. Ils utilisent le temps présent et le temps passé. C’est l'énonciation du hic et nunc. A la différence des chroniqueurs de la Première croisade Guillaume de Tyr parle de la troisième personne, il raconte des évènements de longue date et utilise le temps plusquparfait, le subjonctif et les formes impersonnelles (par excellence la troisième personne) ce qui suppose l’absence du destinataire. Dans ce cas la présence de l’auteur du récit n’est pas si évidente. On noté la différence entre le plan du discours qui est typique aux chroniqueurs de la Première croisade et le plan de l’histoire (de la narration historique) qui caractérise la manière narrative de Guillaume de Tyr. On observe aussi les changements de la terminologie qui est utilisée pour qualifier l’autre. A la différence des chroniqueurs de la Première croisade qui appellent les musulmans «gentiles», «pagani» (ce qui signifie le plus souvent les «païens»), Guillaume de Tyr les appelent les «infideles». Ces changements reflètent les attitudes plus tolérantes envers les musulmans.
Enfin, on s’occupait de l’analyse des interactions entre la tradition orale (littéraire), écrite (historique) et visuelle. L’analyse des liens entre ces traditions est le seul mode de pénétrer dans l’imaginaire du Moyen âge. On observait un certain parallèle dans le dévéloppment de ces traditions, la tendance du symbolisme vers le réalisme. On a découvert les traces de la culture orale dans les chroniques de la Première croisade — les motifs et les sujets empruntés des chansons de geste, les monologues et les dialogues imaginaires, le discours direct etc. En analysant les sujets des textes (l’idée de la conversion, le portrait moral, l’hiérarchie politique etc.) on a découvert les mêmes topos dans les chroniques ainsi que dans les chansons de geste du cycle du Roi. On a supposé qu’on interprétait ces chansons dans les camps des croisés et que les chroniqueurs pouvaient emprunter de ces chansons les sujets et les images pour leurs oeuvres (Sous ce rapport les croisés composaient une certaine «textual community» selon l’expresssion de B. Stock). Dans la suite ces motifs et ces topos dont la connaissance sousentend le niveau assez élevé de la culture de la memoria, est remplacée par la nouvelle expérience. On ne les voit plus tard dans la chronique de Guillaume de Tyr. Mais les stéréotypes de l’image des musulmans (l’idolatrie, la perfidie, l’imperfection morale) qui se sont formés dans les chansons de geste du cycle du Roi et de Guiialume et le type iconographique spécial (le turban, la peau noire, la barbe) apparaissent plus tard dans les chroniques de la Première croisade. On ne les découvre pas chez Guillaume de Tyr, par contre, on les voit dans l’iconographie de la chronique de Guillaume de Tyr. Il apparaiisent encore plus tard dans les récits des pèlerins et des missionaires des XIII–XIV s.s. ainsi que dans l’iconographie de ces oeuvres. Dans la suite les stéréotypes qui se sont formés à l'époque des croisades se déplacent vers l’Amérique.
Список сокращений[1320]
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